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Je rêve de faire venir Clapton

UNE VIE ROCK'N'ROLL

A bientôt 60 ans, Daniel Rossellat peut se targuer d’avoir une vie bien remplie. Rencontre avec le syndic de Nyon et directeur du Paléo festival, un cartésien atypique qui vit à 100 à l’heure.

Quelles formations avez-vous suivies ?

J’ai fait mes écoles à Nyon puis un apprentissage de mécanicien électricien à Genève. J’ai ensuite commencé des études d’ingénieur que j’ai abandonnées pour me lancer à fond dans le spectacle. Pour les payer, j’avais une occupation d’animateur socioculturel dans une maison de jeunes et je travaillais les soirs et les week-ends pour 1'000 francs par mois, ce qui me permettait de me débrouiller comme étudiant. Parallèlement à ma formation, j’avais beaucoup d’activités à mener de front d’autant plus que j’avais inventé plein de choses notamment le club de hockey sur glace de Nyon que j’ai présidé pendant 25 ans. J’ai toujours essayé d’organiser un certain nombre d’évènements dont des concerts. Mais un jour, j’ai dû choisir entre ma formation et ma passion. Sur les conseils de mon prof de maths que j’aimais beaucoup, j’ai pris la décision de mettre un terme à mes études. Pour moi, c’était un échec mais je ne savais pas vraiment ce que je voulais faire.

Quel regard portez-vous sur votre parcours ?

Si je regarde le chemin parcouru, je me dis fi nalement que le fait d’avoir été contraint de faire un choix m’a obligé à travailler sans fi let et à aller à fond. Surtout, il ne faut pas se laisser décourager. Ce fut une expérience extraordinaire. J’ai appris sur le tas et chaque erreur se payait tout de suite. Lors des premiers shows, il manquait toujours quelques spectateurs pour que cela aille bien.

Quel étudiant étiez-vous ?

Aux cours j’étais concentré car je détestais faire les devoirs à la maison mais j’avais de la facilité. Je n’étais pas bon en orthographe mais j’aimais beaucoup la rédaction. J’ai fait de gros progrès grâce à un prof de français à l’école d’ingénieur car il a su l’inculquer à un esprit cartésien comme le mien. Je n’y comprenais rien et lui nous a expliqué d’une manière très mathématique quelle était la logique des mots. J’ai adoré. C’est comme ça que j’ai eu envie de rédiger des piges et que j’y ai pris du plaisir. Je n’avais pas beaucoup de talent mais cela m’a énormément plu.

Paléo et étudiants, une formule gagnante ?

On a 4'600 bénévoles dont un certain nombre d’étudiants. Pour eux, c’est presque une première expérience professionnelle même si elle se déroule dans un contexte qui paraît décontracté et festif.

De plus, nous engageons chaque année une douzaine de stagiaires qui viennent de différentes écoles et, ce qui est extraordinaire, c’est tout d’abord la motivation de ces jeunes qui constituent un réservoir pour le futur. Il y a plusieurs stagiaires qu’on a gardés et on découvre de vrais talents, des gens incroyables. Cela met plein d’oxygène dans l’aquarium. On a un joli réservoir et on tient à garder le contact avec chacun. Cette formule m’enthousiasme !

Qu’est-ce qui fait la force de votre festival?

C’est la victoire de l’amitié, de la passion, de la motivation et du travail. Beaucoup de gens ont contribué à ce succès et se sont investis. La forme actuelle du festival est une addition d’expériences, d’échecs surmontés et d’erreurs corrigées. Après chaque édition, on fait des bilans et des sondages afin de voir ce qui est perfectible. Je pense que c’est l’une des raisons de notre succès. On peut avoir le plus beau des rêves, si on veut le réaliser, il faut commencer par se réveiller et se lancer à fond.

Quels évènements vous ont le plus marqué?

Les premières éditions qui ont eu lieu à Colovray et à Nyon! C’est quand même une sensation assez étrange car on a imaginé et dessiné les plans 200 fois et tout d’un coup, le rêve se réalise. Lorsqu’à Colovray il y a eu les premières notes de musique sur la scène, j’ai eu un vertige. Je me suis dit «j’ai fait décoller un avion mais je ne sais pas si je saurai le piloter.» C’était une émotion tellement forte! Un autre moment mémorable est la tempête de 1992, trois heures avant l’ouverture des portes. Des installations sont tombées et l’électricité a été coupée pendant plusieurs heures. Il y a eu des dégâts matériels importants mais, fort heureusement, il n’y a pas eu de blessés à déplorer. A 20h, on a quand même ouvert les portes et il y avait du soleil. La lumière était revenue, les nuages étaient partis et il y avait la grande foule! On avait enlevé toutes les traces des dégâts.

Autrement, j’ai vécu des instants uniques liés à la musique. Voir sur scène des artistes que j’ai écoutés des milliers de fois comme Paul Simon, Bob Dylan et Neil Young, c’était incroyablement fort.

Quel est l’artiste que vous espérez voir monter sur scène?

Eric Clapton et Léonard Cohen sont des chanteurs que j’aimerais accueillir. On les a déjà invités plein de fois mais cela ne marche jamais. Le second préférerait mieux une salle avec son public car il n’a pas trop envie de faire des festivals. Clapton, cela fait des années que ce n’est pas le bon moment. MB

SOUVENIRS, SOUVENIRS !

1 er job d’été: En été, j’aidais à la ferme et en automne, je faisais les vendanges. Vers 16 ans, je m’occupais de chevaux de course. Et accessoirement, on faisait des paris et quand on ga - gnait c’était notre argent de poche.

1er amour: Alors ça c’est dif - ficile. C’est quand j’avais six ans avec la sœur d’un ami et complice. Je la prenais par la main pour aller à l’école. 1er logement: Rue de Rive 42. C’était un bâtiment pas chauffé et qui ne disposait que d’eau froide.

1ère voiture: C’était une Ford Taunus qui datait de 1959. A l’époque je l’ai payée 450.- Ensuite, j’ai acheté une vingtaine de poubelles que je bricolais moi-même ou avec mes copains.

1ères vacances: J’ai fait une petite fugue à tout juste 16 ans et je suis parti dans le sud de la France à Avignon et Cannes. Mais j’ai écrit une carte postale à mes parents pour ne pas les inquiéter.